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La publication des statistiques provisoires du Recensement administratif à vocation d’état civil (RAVEC), réalisé simultanément au recensement électoral, fait naître de nombreuses interrogations à travers le pays. Plusieurs voix, notamment dans les milieux politiques et de la société civile, remettent en cause la fiabilité des chiffres avancés par le ministère de l’Administration du territoire et de la Décentralisation.
Selon les statistiques provisoires, le recensement réalisé dans le cadre du Registre national des personnes physiques (RNPP) – concernant les Guinéens de 10 ans et plus, a permis d’enrôler 8 979 923 personnes, dont 98,45 % recensées à l’intérieur du pays, contre seulement 1,55 % pour les Guinéens vivant à l’étranger.
En tête des régions administratives, Kankan s’impose avec 2 089 320 personnes recensées, soit 23,27 % du total national. Elle devance même la capitale Conakry, qui affiche 1 992 986 recensés, représentant 22,19 %.
Derrière ces deux pôles majeurs, les régions de Kindia (12,92 %), N’Zérékoré (12,19 %) et Boké (8,62 %) occupent également une place significative. En revanche, les régions de Labé (4,53 %), Mamou (4,86 %) et Faranah (7,59 %) restent en retrait.
Un autre point de controverse réside dans le décalage entre les chiffres du recensement électoral et ceux du Registre national des personnes physiques (RNPP). Alors que Kankan arrive en tête dans le RNPP avec plus de 2 millions de personnes recensées, elle compte moins d’électeurs (1 515 741) que Conakry (1 537 426) dans le fichier électoral. Une incohérence qui alimente les interrogations sur la fiabilité et la cohérence des données officielles.
Une domination démographique suspecte
Cette situation alimente les soupçons, d’autant plus que Kankan est la région d’origine du président de la transition, le général Mamadi Doumbouya. Pour le ministère, cette forte population serait liée à l’exploitation artisanale de l’or, qui attire de nombreux citoyens. Mais pour certains observateurs, cette explication ne tient pas. Ils soupçonnent plutôt une manœuvre politicienne destinée à accorder un poids électoral plus important à un éventuel candidat soutenu par la junte.
Répartition inégale des kits d’enrôlement
La contestation ne se limite pas aux chiffres. Le déroulement même du recensement est mis en cause. Le Bloc Libéral, par exemple, avait tiré la sonnette d’alarme dès le mois de mai sur l’iniquité dans la répartition des 6 000 kits d’enrôlement à travers le pays. Selon ce parti dirigé par Faya Millimouno, Kankan aurait reçu 30 % des kits, tandis que la capitale Conakry, pourtant plus peuplée, selon les recensements antérieurs, n’en aurait eu que 15 %.
Or, plus de kits signifie plus de centres d’enrôlement, donc plus de citoyens enregistrés. Ce déséquilibre aurait donc influencé mécaniquement les résultats finaux.
Les irrégularités ont été signalées dès le démarrage du processus, le 15 avril 2025. À Sonfonia, quartier de Conakry, seulement 15 kits étaient disponibles sur les 119 prévus au début des opérations. Plusieurs semaines plus tard, 108 kits étaient finalement installés, mais 7 étaient hors service.
Dans la préfecture de Koundara, le Premier ministre Bah Oury lui-même avait constaté, lors d’une tournée à Saréboïdo, que quatre districts sur les 14 que compte la commune rurale, n’avaient reçu aucun kit. Il avait interpellé publiquement le ministère pour résoudre ce problème. Mais selon les témoignages locaux, le manque n’a jamais été comblé jusqu’à la fin du recensement.
Le Premier ministre avait également évoqué d’autres problèmes dans la région de Boké, notamment à Kounsitel, Kakoni et Koumbia, où la délivrance des jugements supplétifs posait problème. À Nzérékoré, en Guinée Forestière, les autorités et citoyens ont dénoncé des pannes électriques, l’absence d’actes de naissance, et des difficultés administratives.
La fiabilité du fichier électoral remise en question
Au vu de ces constats, de nombreux acteurs jugent que les résultats du recensement ne peuvent pas être considérés comme fiables. La répartition inégale des kits, les dysfonctionnements techniques et les conditions logistiques variables ont largement impacté l’équité du processus.
Pour beaucoup, le fichier électoral en cours d’élaboration risque d’être entaché de soupçons, avec un risque élevé de contestations lors des prochaines élections. Certains dénoncent déjà une porte ouverte aux manipulations et aux fraudes électorales, comme les bourrages d’urnes.
Alors que la transition politique se poursuit, la crédibilité du processus électoral devient un enjeu majeur. Et sans correction rapide des déséquilibres constatés, la confiance entre les acteurs politiques et les autorités de transition pourrait continuer de s’éroder.
L’article Recensement en Guinée : chiffres contestés à Kankan, soupçons de manipulation électorale est apparu en premier sur Guinee360 - Actualité en Guinée, Politique, Économie, Sport.