Multiplication des forages domestiques: « Cela peut entraîner des affaissements du sol», prévient Hafiziou Barry

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À Conakry, la multiplication des forages individuels n’est plus un secret aujourd’hui. On estime que la capitale en compte près de 60 000, un chiffre alarmant qui soulève de graves questions sur l’impact environnemental et la sécurité des populations. Face à cette prolifération, un phénomène qui s’est développé sous le regard impuissant des autorités, la rédaction de votre quotidien en ligne a interrogé Mamadou Hafiziou Barry, expert en gestion intégrée des ressources en eau et secrétaire exécutif du Partenariat national de l’eau de Guinée.

Pour comprendre l’ampleur du phénomène, M. Barry en a retracé la genèse. Selon lui, cette multiplication des forages est la conséquence directe des défaillances de la Société des eaux de Guinée (SEG). Pendant de longues années, le déficit de production et de distribution de l’eau potable a contraint les habitants à chercher des solutions alternatives.

« Ce déficit a créé de nombreux problèmes. Les populations, naturellement, se sont tournées vers les forages pour leur approvisionnement » explique-t-il précisant que cette alternative a eu un avantage, c’est la réduction des souffrances, en particulier des femmes et des enfants, qui passaient des heures à chercher de l’eau.

Ces forages ont, d’une certaine manière, contribué à améliorer l’accès à l’eau potable, notamment dans les quartiers les plus touchés comme Ratoma, où la situation était critique. Les particuliers qui en avaient les moyens ont réalisé des forages domestiques et ont partagé cette ressource avec leurs voisins, rappelle-t-il d’entrée.

Des risques souterrains et l’instabilité du sol 

Bien que ces forages aient soulagé les populations, ils ne sont pas sans danger. M. Barry met en lumière les risques liés à l’instabilité du sol.

« Lorsque nous extrayons l’eau souterraine, cela peut provoquer une baisse de la pression dans les nappes phréatiques, ce qui peut entraîner un tassement et, dans certains cas, des affaissements du sol », a-t-il prévenu. L’expert ajoute que le pompage continu, surtout dans les sols argileux, peut causer des fissures.

Malgré ces risques avérés, M. Hafiziou Barry regrette le manque d’études approfondies sur la question en Guinée.

« Nous n’avons pas d’études pour confirmer si ces forages constituent réellement une menace pour la stabilité du sol chez nous », a-t-il précisé.

En plus des risques géologiques, la prolifération des forages pose un sérieux problème de gestion des ressources en eau. L’absence d’un inventaire national exhaustif du volume d’eau souterraine disponible en Guinée rend difficile l’évaluation de l’impact de cette surexploitation. Or, le renouvellement de ces ressources prend de très nombreuses années.

« Si nous continuons à exploiter de manière effrénée, nous nous exposons à des risques que nous ne maîtrisons pas concrètement », a-t-il alerté.

Les solutions: investir dans le service public 

Pour M. Barry, la solution est claire et unique : il faut investir massivement dans la Société des eaux de Guinée (SEG).

« Il n’y a pas mille chemins. Il faut renforcer les capacités d’investissement de la SEG, moderniser ses infrastructures de production, ses lignes de transport, et corriger les fuites d’eau », insiste-t-il. Il souligne également la nécessité d’améliorer le réseau de distribution et d’éduquer les consommateurs à une utilisation plus rationnelle de l’eau.

Toutefois, il se montre réaliste : «Pour l’heure, il est très difficile de maîtriser la question des forages privés. L’offre de la SEG ne suffit pas à satisfaire la demande tant que la population n’aura pas d’autres moyens d’avoir accès à l’eau potable, elle continuera à avoir recours à ces forages », a conclu Mamadou Hafiziou Barry.

Alhassane Fofana 

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