Installation de compteurs prépayés à Kamsar (Boké) : la colère des habitants de Momoyiré contre EDG

« La communauté s’est mobilisée, nous avons cotisé de l’argent pour acheter les poteaux et les fils. Nous avons même payé la main-d’œuvre, les agents et toutes les démarches. Malgré cela, ils viennent toujours nous importuner avec cette histoire de compteurs. Aujourd’hui, ils sont revenus avec le chef de secteur Bozic, et ils ont coupé notre courant depuis le matin. Nous ne refusons pas les compteurs, mais il faut d’abord respecter les conditions », a déclaré N’faly Savané.

Les habitants du secteur 3 de Momoyiré, dans le district de Kawas (sous-préfecture de Kamsar) ont haussé le ton hier, mercredi 17 septembre 2025, contre le débranchement de leur ligne électrique par la société Électricité de Guinée (EDG). Selon eux, cette coupure est injustifiée, car ils n’ont jamais bénéficié d’un véritable appui de l’État pour leur électrification. Pour être raccordés, les citoyens affirment avoir mobilisé près de 97 millions de francs guinéens afin d’acheter eux-mêmes des poteaux électriques, des câbles et de financer la main-d’œuvre. Alors qu’ils n’ont pas encore fini de rembourser leurs dettes, EDG tente d’imposer l’installation de compteurs prépayés dans le quartier. Une situation que les habitants jugent inacceptable tant que leurs conditions ne sont pas respectées : la mise en place de poteaux de qualité, de câbles adaptés et une amélioration de la tension électrique. Certains pointent également du doigt le chef du secteur, qu’ils accusent d’être à l’origine de la coupure, et dénoncent une injustice comparée à d’autres quartiers de Kamsar où les compteurs prépayés n’ont pas encore été installés, a constaté Guineematin.com à travers un de ses reporters.

N’Faly Savané, manifestant

N’Faly Savané, manifestant, dénonce un traitement inéquitable. « Depuis un certain temps, nous rencontrons beaucoup de problèmes avec ce courant. À chaque fois, des agents de l’EDG viennent soi-disant pour installer des compteurs prépayés. Nous leur avons demandé pourquoi. Ils nous ont dit que c’est obligatoire, que ça vient du sommet, donc on ne peut pas s’y opposer. On leur a répondu qu’il n’y avait pas de souci, mais à condition que l’État installe d’abord des poteaux et des câbles adéquats. La communauté s’est mobilisée, nous avons cotisé de l’argent pour acheter les poteaux et les fils. Nous avons même payé la main-d’œuvre, les agents et toutes les démarches. Malgré cela, ils viennent toujours nous importuner avec cette histoire de compteurs. Aujourd’hui, ils sont revenus avec le chef de secteur Bozic, et ils ont coupé notre courant depuis le matin. Nous ne refusons pas les compteurs, mais il faut d’abord respecter les conditions. À Bagataye par exemple, ils ont l’électricité depuis longtemps et il n’y a pas de compteurs. Pourquoi nous imposer cela ici alors que nous avons tout financé nous-mêmes ? Nous lançons un appel solennel au président de la République et au gouvernement pour qu’ils nous viennent en aide. Nous n’avons ni routes praticables ni un courant stable. Dans ces conditions, il est injuste de venir encore nous menacer et nous couper l’électricité », a-t-il déclaré.

Mme Condé, infirmière, s’inquiète quant aux conséquences de ces coupures sur les patients qui viennent à la clinique de la zone où d’autres reçoivent des soins chirurgicaux.

Mme Condé, infirmière

« Nous sommes là pour le problème du courant. Ils imposent les compteurs, mais dans d’autres quartiers certains n’en ont pas, d’autres en ont. Même dans notre clinique, ils ont installé plusieurs fois, et quand ça coupe, malgré nos appels, ils ne viennent pas. Cela met en danger les malades, surtout lors des opérations chirurgicales. Nous ne sommes pas contre l’installation des compteurs, mais pas dans ces conditions. Nos routes sont impraticables, et quand un malade doit être évacué, l’accès est très difficile », a-t-elle souligné.

Cet autre citoyen, Yaya Bangoura, voit des visées politiques derrière cette initiative de l’EDG. Selon lui, les habitants Momoyiré sont taxés d’opposants à la nouvelle constitution.

Yaya Bangoura, citoyen manifestant

« Le gouvernement avait envoyé des poteaux jusqu’à un certain niveau. On nous a dit que si nous voulions de l’électricité, nous devions acheter nous-mêmes les poteaux et les câbles. Nous avons payé 400 000 GNF, puis 800 000 GNF, puis encore 8 millions pour l’installation des fils. Après toutes ces dépenses, ils viennent couper notre ligne et nous imposer les compteurs prépayés. Nous disons que tant que toute la ville de Kamsar n’a pas les compteurs, nous n’accepterons pas. Sinon, c’est de la politique, ils estiment que nous ne sommes pas favorables au pouvoir en place, donc ils nous coupent. Le chef de secteur Bozic et son secrétaire Sibory sont venus couper nos fils. Bozic a même dit que le transformateur lui appartenait, alors que nous savons tous que c’est pour l’État. Nous interpellons les autorités de nous aider », a-t-il indiqué.

Zaoro Kpoghompu, professeur de géographie et résident de Momoyiré, rappelle que les habitants se sont endettés pour bénéficier de l’électricité.

Zaoro Kpoghompu, professeur de géographie et résident de Momoyiré

« C’est une injustice totale. Quand l’électricité a été installée à Kamsar, notre quartier a été oublié. À la mairie, on nous a dit que les matériels envoyés par l’État étaient finis. On nous a demandé de chercher des poteaux et des câbles pour être branchés. Nous avons recensé 51 maisons, chacune a contribué 200 000 GNF, puis nous avons encore ajouté jusqu’à 525 000 GNF par famille. Au total, nous avons dépensé plus de 97 millions de francs guinéens. Or, nous n’avons même pas fini de payer nos dettes qu’on veut nous imposer les compteurs. Nous demandons aux autorités de nous aider à régulariser notre situation avant toute installation de compteurs. Nous voulons être traités comme les autres quartiers de Kamsar », a-t-il lancé.

À noter que, face à cette situation, le chef de secteur de Momoyiré n’a pas voulu réagir au micro de notre reporter. Toutefois, il a confié hors micro que l’installation des compteurs prépayés concerne tout Kamsar et que lui-même en possède un. Il a ajouté qu’EDG Kamsar ne dispose pas encore des moyens nécessaires pour élargir l’installation des poteaux en vue d’électrifier d’autres quartiers. Il a, par ailleurs, accusé les manifestants d’avoir proféré des injures contre les agents d’EDG, ce qui aurait motivé le débranchement de leur ligne, conformément aux instructions des autorités locales. Cependant il promet de mener des négociations auprès des autorités locales et EDG afin que le réseau électrique soit rétabli dans le secteur.

Ismaël Diallo pour Guineematin.com

Tél: 624693333

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