État-civil : « aucun document d’identité n’avait de base légale », selon Djénabou Touré

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Le 15 avril 2025, les autorités ont lancé le tout premier recensement administratif à vocation d’état-civil (RAVEC), une étape cruciale vers l’identification fiable des citoyens. Un moment qualifié d’« historique » par Djenabou Touré, Directrice nationale des Affaires politiques et de l’administration électorale, qui parle d’une « normalisation » tant attendue depuis l’indépendance.

« Il faut qu’on le dise. 67 ans après l’indépendance, nous rentrons dans la normalisation », a-t-elle déclaré.

Ce projet ambitieux repose sur un système d’identifiant unique attribué dès la naissance et conservé jusqu’au décès. Un identifiant qui, selon Mme Touré, incarne « l’indépendance numérique » de la Guinée. Car, pour la première fois, le numéro d’identification est conçu, généré et conservé sur le territoire national par des ingénieurs guinéens.

Elle a ensuite affirmé que jusqu’ici, il n’y avait aucune base légale pour les documents d’identité utilisés dans le pays.

« Aucun document d’identité, ni passeport, ni carte d’identité, ni permis de conduire, n’avait de base légale », a-t-elle rappelé, soulignant l’importance de la nouvelle loi qui encadre désormais à la fois les documents d’identité (comme la carte nationale d’identité, l’acte de naissance et le certificat de nationalité) et ceux d’identification (passeport, carte d’électeur, permis de conduire).

La digitalisation des actes de naissance, rendue possible par un décret adopté récemment, représente une avancée décisive. Le registre national des personnes physiques devient ainsi une extension moderne de l’état civil, apportant une traçabilité inédite dans la vie administrative du pays.

Un outil au service du développement

Au-delà de l’identification, souligne Mme Camara Djenabou Touré, le recensement vise à produire des statistiques vitales, permettant d’éclairer les politiques publiques dans des domaines aussi variés que l’éducation, l’habitat ou l’emploi.

« On peut recueillir les statistiques pour dire les tranches d’âge, voir comment l’immigration, même à l’intérieur du pays, se déroule », a-t-elle expliqué, avant d’ajouter qu’avec une base de données fiable, les autorités pourront planifier plus efficacement la construction d’écoles, la distribution de logements ou encore l’affectation du personnel administratif. Ce recensement devrait également contribuer à renforcer la sécurité nationale, en luttant contre le terrorisme et les migrations incontrôlées : « Cela permet aussi de renforcer la sécurité face au terrorisme. Des personnes entrent sur le territoire sans être identifiées. Elles deviennent guinéennes, du fait de la corruption et d’un certain laxisme. On ne sait pas ce qu’elles font ici. Ce travail permet justement de mieux encadrer l’immigration. Beaucoup pensent que l’immigration concerne uniquement ceux qui quittent le pays, mais en réalité, de nombreuses personnes arrivent en Guinée, sans que l’on sache pourquoi. Et elles peuvent rester. Parfois, après deux ou trois mois seulement, elles obtiennent la nationalité guinéenne. C’est précisément cela que nous voulons éviter à travers ce travail. »

Un projet à large échelle

L’ampleur de l’opération est sans précédent : plus de 50 000 personnes mobilisées sur le terrain, dont 5 000 opérateurs de saisie à l’intérieur du pays et plus de 1 000 à l’étranger. S’y ajoutent les membres des commissions administratives, les superviseurs, et d’autres acteurs impliqués.

Mme Touré a également souligné l’effort financier du pays pour rompre avec la dépendance aux recensements coûteux menés jusque-là par des partenaires étrangers : « Le contrat de Sagem en 2008, c’était 35 millions de dollars. Aujourd’hui, on investit dans nos propres moyens humains et techniques ».

À cette étape, dit-elle, seuls les citoyens guinéens âgés de 10 ans et plus sont concernés par l’opération. Les étrangers présents sur le territoire seront pris en compte ultérieurement, conformément aux dispositions prévues par la loi.

L’aboutissement de ce processus permettra à chaque citoyen recensé de recevoir une copie intégrale gratuite de son acte de naissance ainsi que l’accès aux autres documents d’identification normalisés.

Au-delà des enjeux techniques et sociaux, ce recensement prépare le terrain pour le respect du futur calendrier électoral, après l’adoption d’une nouvelle constitution.

« On sortira de ce processus de recensement, on peut rentrer dans un calendrier normal d’élection », a indiqué Mme Touré, qui voit dans cette initiative un levier pour garantir la régularité du cycle électoral et la crédibilité des scrutins à venir : « Ça nous garantit au moins que nous allons respecter le cycle électoral qui va venir après la nouvelle constitution. Qu’on est capable de dissoudre l’assemblée et d’organiser les élections au délai indiqué dans la constitution. C’est ça aussi que nous voulons garantir à notre pays. »

Le recensement biométrique lancé le 15 avril 2025 est bien plus qu’une opération administrative. Il s’agit d’un projet structurant pour l’État guinéen, appelé à renforcer son autorité, sa souveraineté numérique et sa capacité de planification. Une révolution silencieuse mais déterminante pour l’avenir du pays.

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