Par faute d’agrément, le mouvement APG décide de se taire sur les questions politiques et de gouvernance

il y a 19 heures 112
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Le mouvement Agissons Pour la Guinée (APG) s’est exprimé ce lundi 8 septembre lors d’un point de presse animé à la Maison de la Presse de Guinée, pour clarifier sa position relative au référendum constitutionnel prévu le 21 septembre prochain.

Dans une déclaration lue par le président de l’organe provisoire de gestion de l’APG, le mouvement a annoncé sa décision de suspendre provisoirement ses prises de parole publiques sur les questions politiques et de gouvernance. Cette mesure est motivée par la non-obtention d’un agrément officiel, document délivré par le Ministère de l’Administration du Territoire et de la Décentralisation (MATD), qui conditionne leur existence légale.

Selon Ibrahim Kalil Diallo, journaliste et politologue, président de l’organe provisoire de gestion de l’APG, cette communication n’avait pas pour objectif de se plaindre ou de créer de la confusion, mais plutôt de dénoncer une injustice que subit leur mouvement. Il a par ailleurs insisté sur la nécessité de partager la position de l’APG sur des sujets essentiels qui marquent la vie nationale, notamment en ce qui concerne le projet de nouvelle Constitution, dont ils relèvent certaines incohérences.

Que s’est-il passé ?

Depuis janvier 2025, en tant que simples citoyens animés par l’amour de la Guinée, nous avons décidé de créer un mouvement politique : Agissons pour la Guinée. Nous l’avons fait non pas par ambition personnelle, mais pour participer au débat public, pour enrichir la réflexion nationale et, éventuellement, pour contribuer aux décisions qui engagent notre avenir collectif.

Dans le respect de la loi et de l’esprit républicain, nous avons déposé une demande officielle d’autorisation auprès du ministère de l’Administration du territoire et de la Décentralisation. La loi est claire:l’administration dispose de trois mois pour nous répondre, favorablement ou défavorablement. Mais aujourd’hui, six mois ont passé. Pas une réponse. Pas une explication. Un silence qui ne dit rien, mais qui signifie tout:  une volonté manifeste de nous écarter du débat politique, d’étouffer notre voix, d’empêcher l’expression d’une alternative citoyenne.

Le mouvement Agissons Pour la Guinée décide ce qui suit…

Face à cela, nous avons pris une décision claire : nous allons saisir la justice guinéenne. Parce que demander l’autorisation d’exister politiquement n’est pas une faveur, c’est un droit garanti par nos lois. Et nous voulons que ce droit soit respecté.

Soyons clairs : notre entrée en politique n’a jamais eu pour but de créer des problèmes. Elle n’a jamais eu pour but de semer le désordre. Au contraire, nous voulons participer, proposer, critiquer lorsque c’est nécessaire, mais toujours avec la volonté de construire. Nous voulons contribuer à l’émergence d’une nouvelle Guinée, une Guinée où la politique ne rime plus avec violence, exclusion ou manipulation, mais avec respect, justice et progrès.

Cependant, parce que la loi ne nous reconnaît pas encore officiellement, nous ne pouvons exercer pleinement sur le terrain. Et parce que nous vivons dans un pays où une simple critique pacifique peut conduire en prison, nous avons choisi  par responsabilité de suspendre, pour l’instant, nos prises de parole publiques sur les questions politiques et de gouvernance.

Je veux que cela soit bien compris : ce n’est ni une démission, ni une peur. C’est un acte de prudence, de protection. Protection pour nous-mêmes, pour nos familles, pour nos amis. Car l’histoire de notre pays nous enseigne que la parole, lorsqu’elle dérange, peut coûter cher.

Mais attention : cela ne veut pas dire que nous allons nous taire sur tout. Lorsque des enjeux majeurs se poseront, nous prendrons la parole. Lorsque l’avenir de la Guinée sera en jeu, nous ferons entendre notre voix. Nous restons engagés, mais nous choisissons d’être stratégiques et responsables.

Position sur le vote référendaire du 21 septembre 2025 en Guinée

Concernant le projet de nouvelle Constitution, notre position est claire. Nous reconnaissons qu’il comporte des aspects positifs. Mais sur les points essentiels – les réformes institutionnelles, les libertés, la démocratie – il ne répond pas à nos attentes. Ces manques sont plus nombreux et plus graves que ses acquis. Voilà pourquoi nous avons décidé de ne pas donner de consigne de vote.

Nous respectons le droit de chaque citoyen de se prononcer selon sa conscience. Mais nous, en tant que mouvement, nous choisissons de ne cautionner ni par un « oui », ni par un « non », un processus auquel nous ne croyons pas. Notre rôle n’est pas de diviser les Guinéens, mais d’ouvrir un chemin nouveau, un chemin où le respect de la loi, la justice et la démocratie ne sont pas des promesses, mais des réalités.

Mesdames et messieurs voici 7 raisons qui expliquent notre choix de ne pas donner de consignes de vote au referendum :

La première raison, c’est la durée du mandat présidentiel

Le projet de constitution ne répond pas à nos attentes en matière de réforme institutionnelle. La prolongation du mandat présidentiel de cinq à sept ans, par exemple, constitue un net recul. En effet, cette accumulation de pouvoir a par le passé engendré instabilité et crises politiques. L’expérience montre que la longévité d’un président au pouvoir ne garantit pas le développement du pays. On nous propose 7 ans renouvelables une fois. Cela veut dire qu’un seul homme peut gouverner la Guinée pendant 14 ans. Mais, chers compatriotes, souvenons-nous! Nous avons déjà vécu cela. Sous Lansana Conté, les mandats de 7 ans n’ont pas apporté la stabilité. Ils ont produit la fatigue, la lassitude, et l’enlisement. La France elle-même, notre ancienne puissance coloniale, avait des mandats de 7 ans. Après des décennies, elle a ramené à 5 ans. Pourquoi ? Pour que le peuple contrôle plus rapidement ses dirigeants. Le Sénégal a fait le même choix.

Alors, pourquoi la Guinée choisirait-elle de reculer là où les autres avancent ? Ce n’est pas la durée d’un mandat qui développe un pays. C’est la vision, c’est la gouvernance, c’est la volonté! Un président courageux peut transformer son pays en 5 ans. Un président faible peut ruiner son pays en 20 ans. Allonger le mandat, c’est prolonger l’attente, c’est éloigner le peuple du pouvoir. C’est un recul historique.

-La Deuxième raison tourne autour de l’immunité présidentielle !

Bien que nous saluions l’instauration d’une Haute Cour de Justice pour juger le Président, nous déplorons en parallèle l’immunité accordée à tous les anciens chefs d’État, qui va à l’encontre de la logique d’un véritable État de droit. À un niveau institutionnel, l’établissement d’une Cour spéciale chargée de juger le président et les membres du gouvernement pour des actes de haute trahison paraît offrir une garantie de contrôle renforcé. On pourrait penser qu’elle servirait de barrière contre les abus de pouvoir. Cependant, cette juridiction pourrait devenir un refuge inaccessibile, à l’abri de toute remise en question, si ses juges sont désignés sans supervision extérieure.En Afrique de l’Ouest, peu d’États ont mis en place des juridictions spécifiquement conçues pour juger un chef d’État accusé de haute trahison. Même lorsque de telles « hautes cours » existent, elles présentent souvent des lacunes similaires à celles observées dans le projet guinéen.

La Troisième raison c’est la question de la double nationalité qui n’est pas clairement résolue.

Cependant, l’idée de permettre la double nationalité pour des postes électifs, en particulier pour la magistrature suprême, constitue une atteinte au principe de souveraineté de l’État et soulève des interrogations quant à la loyauté du chef de l’État envers sa nation. Comme le veut l’adage, «On ne peut pas servir deux rois à la fois ». En cas de tensions diplomatiques entre la Guinée et le pays de la seconde nationalité, le président pourrait se trouver dans une situation délicate. Si la Constitution n’établit pas clairement les obligations exclusives du président envers la Guinée, cela pourrait engendrer des lacunes juridiques en matière de responsabilité, de sécurité nationale ou de diplomatie. Ainsi, un président possédant une double nationalité pourrait, en théorie, bénéficier de la protection juridique d’un autre État, ce qui poserait des problèmes en cas de poursuites ou de litiges. Pour une nation qui aspire à la stabilité politique, à la souveraineté, à une indépendance réelle et à une cohésion sociale, l’idée qu’un chef d’État puisse avoir une allégeance supplémentaire est hautement problématique. Cela crée inévitablement des enjeux de loyauté envers le pays et la nation, même si cela est parfois justifié par un discours inclusif, défendu par les rédacteurs de la Constitution.

-La quatrième raison est axée sur la création d’une institution anti démocratique et budgétivore !

La création d’un Sénat dans un pays de moins de 15 millions d’habitants suscite également des interrogations sur la nécessité et l’urgence de telle institution.

Renforcer l’Assemblée nationale aurait été une option plus judicieuse.Tenez 33/ des membres du sénat seront nommés par le président de la république ce qui privera l’assemblée nationale de son indépendance par rapport à lexecutif.

-La cinquièmes raison évoque la suppression des débats télévisés.

Nous devons aussi évoquer la suppression des débats télévisés entre candidats, qui est un pas en arrière pour notre démocratie. Dans un monde connecté, priver les citoyens de la possibilité d’évaluer les candidats au travers de débats est regrettable.

La sixième raison elle, relève l’exclusion de la jeunesse à la course à la présidentielle :

En outre, l’introduction d’une limite d’âge pour la candidature à la présidence, fixée à 40 ans, élimine la voix des jeunes, qui constituent plus de la moitié de notre population. Bien que les candidatures indépendantes soient autorisées, la situation actuelle laisse entendre que la jeunesse se voit toujours exclue des hautes instances politiques. Nous devons également aborder la question de l’éducation. Affirmer que l’école sera gratuite, en ignorant les vraies difficultés structurelles et de qualité de notre système éducatif, relève de l’ignorance . Au lieu de cela, le débat doit se centrer sur l’établissement de standards d’éducation élevés et sur la création de conditions favorables.

-Enfin la Septième raison c’est l’incapacité à assurer l’accès effectif aux droits fondamentaux.

Si le texte actuel venait à être adopté, la future constitution prétendrait garantir aux citoyens un ensemble de droits fondamentaux. Pourtant, ces droits, bien que louables, restent souvent des objectifs ambitieux, même pour des États dotés de moyens suffisants pour les mettre en œuvre.

Le projet prévoit notamment que l’État doit garantir à tous l’accès à une couverture santé universelle, assurer des conditions pour un travail et un logement décents, et faciliter l’accès des étudiants et diplômés à des stages professionnels. Ces engagements constituent non seulement des obligations envers les citoyens, mais pourraient également engager la responsabilité de l’État devant la justice en cas de manquement.

Pourtant, les constitutions antérieures et c’est le cas dans la plupart des pays  reconnaissaient ces mêmes droits fondamentaux sans imposer à l’État de créer toutes les conditions nécessaires pour leur application réelle.  À ma connaissance, aucun État de droit n’a jamais inscrit dans sa constitution une obligation de cette ampleur, car une telle approche relève davantage de l’utopisme que du réalisme.

Ainsi, le CNT ne semble pas s’être appuyé sur les réalités du pays pour proposer un texte opérationnel et applicable. Les dispositions qu’il a introduites risquent de rester théoriques, condamnées à l’ineffectivité, comme beaucoup d’autres articles du projet qui ne sont pas adaptés à notre contexte.

Mes compatriotes, L’enjeu du 21 septembre dépasse largement le simple « oui » ou « non » à un texte. Il s’agit de décider si la Guinée choisira la voie d’une démocratie vivante, d’une République où droits et devoirs se conjuguent dans la confiance et non dans le papier. Accepter une Constitution, c’est accepter un contrat social : les gouvernants promettent de respecter les libertés, et les citoyens s’engagent à honorer la légalité. Sans confiance authentique, ce contrat est vide ; il devient désillusion et instabilité. Une Constitution construite dans la transparence et l’inclusion n’est pas un simple texte : elle peut devenir le socle de notre renaissance politique. Elle transforme la parole publique en un dialogue permanent, accessible à tous et non réservé à une élite.

Le référendum n’est pas la fin d’une transition ; il est le commencement de décennies à venir. Il décidera si la Guinée marche vers le progrès et la justice, ou si elle s’enlise dans une autorité subtilement dissimulée derrière des mots et des signatures..

Le référendum ne doit ni être un plébiscite, ni un piège. Il doit être une chance: repenser notre République, réconcilier notre histoire avec notre avenir, redéfinir notre rapport au pouvoir.

Que Dieu bénisse la Guinée et les guinéens.

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