Projets miniers : les communautés impactés réclament l’adoption du Référentiel national 

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À l’initiative du CODEC, un atelier de plaidoyer s’est tenu ce mercredi 7 mai 2024 à Conakry, réunissant des représentants des communautés locales, d’organisations paysannes, de la société civile et de plusieurs ministères. Objectif : relancer la dynamique autour de l’adoption du Référentiel national sur la compensation, l’indemnisation et la réinstallation des populations affectées par les projets de développement.

Depuis plusieurs années, les projets d’exploitation minière, énergétique et d’infrastructures se multiplient en Guinée. Si leur potentiel économique est incontestable, les conséquences sociales, elles, sont souvent désastreuses pour les communautés riveraines. Expropriations sans compensation adéquate, pertes de terres agricoles, destruction de moyens de subsistance : les déplacements involontaires s’opèrent dans un flou juridique qui laisse les communautés sans véritable recours.

« Ce vide juridique dure depuis plus de 50 ans. Chaque entreprise applique sa propre grille de compensation sans cadre normatif commun », déplore Amadou Ba, coordinateur du CODEC, avant d’ajouter que le Référentiel national vise à harmoniser ces pratiques et à garantir aux populations une indemnisation juste, équitable et conforme aux standards internationaux.

Un processus enclenché depuis 2018… mais resté sans aboutissement

Selon le CODEC, l’élaboration du Référentiel a débuté en 2018 avec l’appui de la coopération allemande (GIZ). En 2020, un comité interministériel a proposé une première version, enrichie ensuite par les contributions du CODEC, de l’Institut international pour l’environnement et le développement (IIED) et des communautés locales. En septembre 2022, tous les acteurs – État, société civile, secteur privé – s’étaient accordés sur le contenu du document, recommandant son adoption par décret. Mais depuis, le processus est resté bloqué à l’étape réglementaire.

Pour Yacouba Camara, leader communautaire à Tintinia (Siguiri), l’attente est devenue insupportable : « Nous sommes très, très assoiffés de l’adoption de ce document. Chez nous, la compensation est un vrai problème. Parfois, on terrasse ton champ sans même t’indemniser. Ce document est notre seul espoir pour que justice soit faite. »

Outre l’adoption, les communautés insistent sur l’importance d’une large vulgarisation du Référentiel, y compris dans les langues nationales. « Il ne suffit pas d’adopter. Il faut expliquer, former, traduire et suivre l’application sur le terrain », insiste Yacouba Camara. Il alerte également sur les pratiques actuelles qui excluent souvent les communautés des processus de concertation : « On consulte les autorités locales et les entreprises, mais pas les populations. »

Même son de cloche chez Barry Moussa Bailo, de la région de Boké : « Ce Référentiel est un ouf de soulagement. Pour la première fois, il prend en compte la compensation de la terre et des plantes non-linéaires. Mais il faut qu’il soit adopté et appliqué. Il faut aussi que les études d’impact environnemental et les plans de gestion soient partagés avec nous. Nous ne sommes pas des bénéficiaires passifs, nous sommes des acteurs du développement. »

Le coordinateur du CODEC s’est voulu optimiste quant à la suite du processus : « Nos échanges avec les représentants du ministère de l’Environnement sont encourageants. Ils travaillent actuellement sur un projet de décret. Nous espérons qu’il sera signé très prochainement. »

Mohamed Salifou Touré, du ministère de l’Environnement et du développement durable, a confirmé ces avancées : « Nous travaillons d’arrache-pied pour finaliser ce Référentiel. Il est crucial pour structurer les mécanismes de réinstallation et d’indemnisation des populations impactées. »

À travers cet atelier, le CODEC et ses partenaires posent une question essentielle à l’État : jusqu’à quand les communautés guinéennes resteront-elles les grandes oubliées du développement ? L’adoption du Référentiel constituerait une avancée majeure, non seulement pour les droits humains, mais aussi pour la stabilité sociale et la durabilité des investissements.

Les regards se tournent désormais vers le gouvernement guinéen. L’avenir des centaines de milliers de Guinéens impactés par les projets d’envergure dépendra de sa volonté à faire de ce document une réalité juridique, et non un simple espoir.

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