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Le diabète est une maladie chronique qui est devenue, au fil des années, une préoccupation mondiale. Elle progresse lentement et souvent en silence. Aujourd’hui en Guinée, les données indiquent une progression inquiétante tant chez les personnes âgées que chez les jeunes.
Cette semaine, notre équipe est allée à la rencontre du Dr Amara Camara, médecin généraliste, spécialisé dans la prise en charge des maladies chroniques dont le diabète et l’hypertension artérielle. Dans une interview qu’il nous a accordée à cette occasion, ce médecin est revenu sur les causes du diabète, les moyens de prévention et est également revenu sur la situation de cette pathologie en Guinée, à ce jour.
Mosaiqueguinee.com : Dites-nous, que devons-nous entendre par le diabète ?
Dr Camara : Le diabète est une maladie qui progresse rapidement, et souvent en silence, mais qui touche de plus en plus de familles guinéennes. Cette maladie chronique, longtemps considérée comme rare ou réservée aux pays riches, est devenue un problème majeur de santé publique en Guinée.
Le diabète est une maladie chronique caractérisée par un excès de sucre dans le sang qu’on appelle hyperglycémie. Cela est dû à un manque d’insuline. Et l’insuline, c’est quoi ? C’est une hormone produite par le pancréas. Ça peut être dû aussi à une mauvaise utilisation de cette insuline par le corps. L’insuline est une hormone dont le rôle essentiel est de faire entrer le sucre dans les cellules pour produire de l’énergie. Mais quand ça ne fonctionne pas bien, le sucre s’accumule dans le sang et finit par causer des dégâts. D’où les complications qui peuvent arriver.
Quels sont les différents types de diabète ?
Il existe plusieurs formes de diabète. Nous allons retenir le type 1, qui est souvent une maladie auto-immune. Généralement fréquent chez les jeunes et les jeunes adultes. Cela veut dire que le corps ne produit pas du tout d’insuline. Donc, il y a une carence de production de l’insuline. Et le traitement de ce type de diabète repose obligatoirement sur l’insulinothérapie, c’est-à-dire par le traitement avec l’insuline à vie.
Il y a aussi le diabète de type 2. C’est le type de diabète le plus fréquent. Il représente 90 à 95 % des cas. Vous voyez combien de fois c’est très important, le diabète de type 2. Il survient généralement après 40 à 45 ans, mais il peut intervenir plus tôt aussi. Le diabète de type 2 intervient quand le corps ne produit plus bien l’insuline. C’est-à-dire que le corps produit de l’insuline, mais elle ne fonctionne pas bien. Et pour ce type de diabète, il y a des facteurs de risque liés à cela. Ces facteurs de risque sont l’hérédité, l’obésité, la sédentarité, l’alimentation déséquilibrée, voire le stress. Ce sont les facteurs de risque.
Le troisième type de diabète est autrement appelé le diabète gestationnel. Ce type se retrouve beaucoup plus chez les femmes pendant la grossesse. Et ce type de diabète a un grand risque sur la mère et l’enfant. Il provoque souvent des accouchements très difficiles. Alors, la patiente risque de développer le diabète juste après l’accouchement.
Quelle est la situation du diabète aujourd’hui en Guinée ?
En Guinée, le diabète est en forte progression. Vous le savez bien, cela est dû à beaucoup de facteurs. Il y a l’alimentation, l’hygiène de vie, le changement brusque de notre mode de vie, etc. Actuellement, nous constatons que cette progression est beaucoup observée dans les villes, où les données montrent actuellement 5 à 7 % des adultes touchés par le diabète en Guinée. Et pire, plus de la moitié de ce chiffre ignore qu’elle est diabétique. Ce chiffre augmente à cause de plusieurs choses. Comme je venais de le dire tout à l’heure, il y a la transition nutritionnelle, la sédentarité, l’urbanisation rapide, le manque de prévention aussi.
Ce qui rend la situation plus grave dans la prise en charge, c’est le diagnostic tardif. Le manque d’accès aux soins spécialisés et le coût élevé des médicaments rendent réellement la prise en charge du diabète très compliquée.
Quelles sont les complications qui peuvent intervenir avec le diabète ?
Le diabète, s’il est bien suivi, dépisté à temps et bien contrôlé, la personne peut vivre longtemps, comme avec d’autres maladies, dont l’hypertension artérielle. Mais s’il est mal contrôlé, on se retrouve avec des complications. Et ces complications se regroupent en deux étapes : au niveau des gros vaisseaux qu’on appelle les macro-angiopathies et au niveau des petits vaisseaux qu’on appelle les micro-angiopathies.
Quelles sont les maladies qu’on peut retrouver au niveau des petits vaisseaux ? Quand nous prenons la vision, les yeux par exemple, le diabète peut créer ce qu’on appelle les rétinopathies diabétiques. Si ces rétinopathies diabétiques ne sont pas bien gérées, à la longue, la personne se retrouve dans un tableau de cécité, donc elle devient aveugle.
Au niveau des gros vaisseaux, on retrouve des maladies cardiovasculaires. La plupart des patients diabétiques, quand ils ne sont pas bien suivis, risquent de développer ce qu’on appelle les accidents vasculaires cérébraux ou l’infarctus du myocarde ; et le tout est regroupé dans les maladies cardiovasculaires. On peut noter également des problèmes au niveau des reins. Le diabète peut aussi créer ce qu’on appelle les néphropathies diabétiques et aller jusqu’à l’insuffisance rénale. Le diabète peut provoquer aussi des problèmes au niveau des nerfs, qui sont souvent caractérisés par des douleurs, des fourmillements, voire des pertes de sensibilité. Donc, si le diabète n’est pas géré, comme je vous le disais, il peut provoquer aussi des problèmes au niveau des pieds, qu’on appelle les pieds diabétiques. Ces pieds diabétiques, si cela continue, peuvent s’infecter ; et quand ça s’infecte et que ce n’est pas totalement géré, on se retrouve avec des amputations. Il est à noter qu’en Guinée, le pied diabétique est l’une des causes les plus fréquentes d’hospitalisation et d’amputation. C’est-à-dire que beaucoup de malades arrivent à l’hôpital très tard, parce qu’ils ignorent leur maladie. C’est pour cela que nous encourageons les malades à venir se faire dépister à temps et faire face réellement à cette maladie.
Comment se fait la prise en charge du diabète et quels sont les moyens de prévention ?
La prise en charge du diabète en Guinée repose réellement sur le diagnostic rapide. Et le diagnostic se fait essentiellement avec une glycémie à jeun. Cette glycémie à jeun se mesure en fonction de fourchettes, de valeurs. Il faudra consulter les médecins spécialistes ; ceux-ci pourront définir si vous êtes atteint du diabète ou pas, en fonction de votre glycémie. Et aussi, s’il y a la disponibilité de certains examens au laboratoire qu’on appelle l’hémoglobine glyquée, ces examens nous permettent aussi de confirmer le diabète et de voir l’équilibre de votre diabète. Ces dépistages sont très importants pour les personnes à risque. Les personnes à risque, ce sont des personnes sédentaires, de gros fumeurs, des gens qui ne bougent pas le corps.
Le traitement du diabète est très simple, mais dépend d’une certaine rigueur sur soi-même et d’un suivi régulier. Cela varie d’un type à un autre. Le diabète de type 1, c’est le traitement avec l’insuline à vie qu’on appelle aussi l’insulinothérapie à vie. Le type 2, il y a l’hygiène de vie qu’on peut instaurer chez le patient et on peut prescrire certains médicaments. Le diabète gestationnel, par exemple, un régime alimentaire adapté peut convenir à une femme qui souffre du diabète. Mais l’insulinothérapie peut aussi être instaurée au cas où la patiente n’est pas bien équilibrée. Le plus important, c’est d’avoir une bonne hygiène de vie, c’est-à-dire avoir une alimentation équilibrée. Il faut aussi avoir une activité physique régulière, arrêter le tabac si vous êtes un gros fumeur et contrôler votre stress aussi.
Par ailleurs, il faut avoir un contrôle glycémique régulier, suivre réellement la tension artérielle, parce que ce sont deux pathologies qui vont de pair et qui provoquent les mêmes complications. Il faut souvent surveiller les pieds, les reins, les yeux, etc. Il faut aussi une très bonne éducation du patient, c’est ce qu’on appelle l’éducation thérapeutique du patient. Surtout, un soutien psychologique familial. Et tout ce qui entoure le patient.
Votre mot de la fin et où peut-on vous trouver ?
Pour efficacement lutter contre le diabète, il faut former davantage les médecins généralistes pour la prise en charge, éduquer les patients et les familles, organiser des campagnes de dépistage communautaire et créer des centres spécialisés. Je m’articule beaucoup sur ça : il faut réellement créer des centres spécialisés, renforcer la communication, surtout associer les jeunes, les radios, les écoles, les leaders communautaires dans la prise en charge et la sensibilisation sur le diabète.
Donc, en conclusion, le diabète est une maladie silencieuse, mais pas une fatalité. Nous pouvons l’éviter par des gestes : mieux manger, bouger un peu plus, se faire dépister régulièrement et prendre des médicaments correctement. À noter qu’en Guinée, nous pouvons briser le silence autour du diabète. Ensemble, avec la volonté, l’information et un bon suivi, nous pouvons sauver des vies.
Je fais l’alternance entre la Guinée et la France. Je collabore avec d’autres collègues dans ce centre de prise en charge Guinée 3ES situé au rond-point Cosa, non loin de la pharmacie Garaya. Nous sommes ouverts tous les jours, pour la prise en charge du diabète.
Interview réalisée par MohamedNana BANGOURA