Un an plus tard, deux activistes guinéens toujours portés disparus (Human Rights Watch)

il y a 7 heures 33
PLACEZ VOS PRODUITS ICI

CONTACTEZ [email protected]

(Nairobi) – Les autorités militaires guinéennes devraient mener une enquête crédible sur les disparitions de deux activistes politiques, divulguer leur lieu de détention, et soit les inculper, soit les libérer immédiatement, a déclaré aujourd’hui Human Rights Watch.

Il y a un an, les forces de sécurité ont arrêté arbitrairement trois membres de la coalition d’opposition Front national pour la Défense de la Constitution (FNDC), Oumar Sylla (connu sous le nom de Foniké Menguè), Mamadou Billo Bah et Mohamed Cissé, à Conakry, la capitale guinéenne, et les ont transférés vers un lieu non identifié. Human Rights Watch a reçu des informations crédibles, confirmées par des médias nationaux et internationaux, selon lesquelles les forces de sécurité auraient torturé les trois hommes. Mohamed Cissé a été libéré le 10 juillet 2024, tandis qu’Oumar Sylla et Mamadou Billo Bah sont toujours portés disparus.

« Cela fait un an qu’Oumar Sylla et Mamadou Billo Bah ont disparu, et les autorités guinéennes n’ont toujours pas mené d’enquête crédible », a déclaré Ilaria Allegrozzi, chercheuse senior sur le Sahel à Human Rights Watch. « Les autorités guinéennes devraient mener une enquête approfondie et indépendante sur ces disparitions et poursuivre les responsables. »

Les autorités ont ouvert une enquête sur la disparition des trois hommes. Mais elles ont nié toute responsabilité et n’ont pas reconnu la détention des hommes ni révélé où ils se trouvaient, malgré les demandes d’informations de leurs avocats et d’organisations nationales et internationales de défense des droits humains.

Le 9 juillet 2024, des dizaines de soldats, de gendarmes et d’hommes armés en civil ont fait irruption au domicile d’Oumar Sylla et l’ont arrêté arbitrairement, ainsi que les deux autres hommes. Les forces de sécurité ont frappé à plusieurs reprises les trois militants politiques, puis les ont emmenés au quartier général de la gendarmerie à Conakry, avant de les transférer dans un camp militaire sur l’île de Kassa, au large de de la capitale.

Le FNDC appelle au rétablissement de la démocratie en Guinée depuis le coup d’État militaire de septembre 2021. En août 2022, la junte guinéenne, dirigée par le général Mamady Doumbouya, a dissous le FNDC pour des raisons politiques, mais celui-ci a poursuivi ses activités.

Le matin de sa disparition, Oumar Sylla, qui est le coordinateur du FNDC, avait exhorté ses partisans à manifester le 11 juillet 2024 contre la fermeture des médias par les autorités et le coût élevé de la vie.

Oumar Sylla faisait partie des personnes arrêtées en 2022 pour « manifestation illicite [et] destruction d’édifice public et privé » à la suite des manifestations violentes ayant eu lieu à Conakry au cours desquelles au moins cinq personnes ont été tuées. Mamadou Billo Bah, le coordinateur de la communication du FNDC, avait déjà été arrêté en janvier 2023 pour « complicité de destruction d’édifices publics et privés, coups et blessures volontaires » pour avoir participé à des manifestations. Tous deux ont été libérés en mai 2023 et innocentés de toute accusation.

Depuis sa prise de pouvoir, la junte a suspendu les médias indépendants et procédé à des arrestations arbitraires et à des disparitions forcées de journalistes et d’opposants politiques. Les forces de sécurité ont fait un usage excessif de la force, notamment de gaz lacrymogènes et de tirs à balles réelles, pour disperser des manifestants pacifiques, causant la mort de dizaines de personnes depuis janvier 2024.

Le 21 juin, des hommes armés ont enlevé et torturé Mohamed Traoré, un éminent avocat et ancien président du barreau, en représailles apparentes à sa décision de démissionner du Conseil national de transition, le principal organe de transition de la junte.

Les autorités militaires ont promis d’organiser des élections avant la fin de 2024, mais n’ont pas respecté ce délai, ce qui a déclenché des manifestations menées par l’opposition à Conakry en janvier. À la suite de ces manifestations, les autorités ont annoncé un nouveau calendrier électoral. Le général Mamady Doumbouya a fixé la date du référendum constitutionnel au 21 septembre, et le Premier ministre Amadou Oury Bah a annoncé en mai que les élections présidentielles auraient lieu en décembre.

« Après quatre ans de régime militaire, la répression des droits et libertés n’a fait que s’intensifier », a déclaré un éminent membre du FNDC qui est entré dans la clandestinité. « Le gouvernement a étouffé la liberté d’expression et de réunion ; il a neutralisé l’opposition politique par des arrestations arbitraires, des disparitions forcées, du harcèlement et des intimidations. Trop c’est trop. »

Selon le droit international, une disparition forcée survient lorsque des personnes agissant au nom du gouvernement arrêtent, détiennent ou enlèvent des personnes. puis refusent de reconnaître cet acte ou dissimulent leur lieu de détention ou ce qui leur est arrivé. Le droit international interdit les disparitions forcées, qui violent les droits fondamentaux à la liberté et à la sécurité, ainsi que le droit de ne pas être soumis à la torture ou à des traitements cruels, inhumains et dégradants.

La Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées stipule que « nul ne sera soumis à une disparition forcée » et impose une interdiction absolue de la détention en secret. Elle exige également des pays qu’ils mettent fin aux pratiques abusives qui facilitent les disparitions forcées, notamment la détention arbitraire au secret, la torture et les exécutions extrajudiciaires.

La Guinée n’est pas un État partie à ce traité, mais est tenue de respecter le droit international relatif aux droits humains qui interdit les arrestations illégales, les enlèvements, les détentions arbitraires, les mauvais traitements infligés aux détenus et autres violations de procédure. Elle garantit aux victimes d’abus le droit à un recours effectif.

« Lorsque les autorités nient avoir connaissance des détentions, elles privent les détenus de toute protection et les exposent à des crimes encore plus graves, comme la torture », a déclaré Ilaria Allegrozzi. « Les autorités devraient prendre des mesures immédiates et concrètes en menant une enquête crédible sur les disparitions des deux activistes, et en ratifiant la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées. »

Lire l'article en entier