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Le 18 décembre 2023, l’explosion du dépôt d’hydrocarbures de Kaloum à Conakry a tragiquement révélé la fragilité du dispositif de protection civile en République de Guinée. Plus de 25 morts, plusieurs centaines de blessés, des pertes économiques estimées à plus de 80 millions de dollars : ce drame a mis en lumière l’urgence de repenser et de moderniser la sécurité incendie et la gestion des risques dans notre pays.
Une vulnérabilité structurelle criante
La Guinée fait face à une exposition multiple aux risques : inondations majeures, incendies industriels et domestiques, explosions, accidents technologiques, sans oublier les risques sanitaires et climatiques. Pourtant, le dispositif de protection civile reste largement insuffisant. Avec moins de 30 casernes opérationnelles pour tout le territoire et un ratio d’un agent de protection civile pour 12 000 habitants — bien en deçà des recommandations internationales —, notre pays est extrêmement vulnérable face aux catastrophes.
Le réseau d’alerte précoce est embryonnaire et limité à quelques zones urbaines, tandis que la formation et l’équipement des sapeurs-pompiers et des équipes d’intervention sont loin des standards requis pour une réponse rapide et efficace. Cette situation compromet gravement la sécurité des populations et freine le développement économique.
Pourquoi la sécurité incendie est une question de souveraineté
La capacité d’un État à protéger ses citoyens face aux risques majeurs est un fondement de sa légitimité et de sa souveraineté. Ne pas anticiper ni prévenir ces risques affaiblit l’autorité publique, alimente la défiance et nuit à l’attractivité économique du pays. L’exemple de Kaloum est éloquent : plusieurs entreprises internationales ont suspendu leurs activités, entraînant des pertes financières et une dégradation de l’image de la Guinée à l’international.
Moderniser la sécurité incendie et la protection civile, c’est protéger des vies, préserver les infrastructures et consolider la crédibilité de l’État guinéen sur la scène africaine et mondiale.
Un plan d’action urgent et structurant
Pour relever ce défi, il est indispensable d’engager une réforme profonde et structurée autour de plusieurs axes clés :
La prévention, un levier économique
Les catastrophes coûtent cher à la Guinée. Les incendies, inondations et accidents industriels génèrent chaque année des pertes économiques colossales, freinant la croissance et aggravant la pauvreté. Pourtant, chaque franc investi dans la prévention permet d’économiser jusqu’à sept francs en réparations, selon la Banque mondiale.
L’installation de systèmes de détection incendie dans les marchés ou les établissements publics coûte bien moins cher que la reconstruction après un sinistre. Des pays voisins comme le Sénégal ou le Maroc ont démontré qu’une politique volontariste de prévention réduit significativement les coûts et les impacts des catastrophes.
Une réforme en cours et des perspectives encourageantes
Le gouvernement guinéen, avec le soutien de partenaires internationaux, a lancé plusieurs initiatives pour moderniser la protection civile. Le Programme d’Appui à la Réforme du Secteur de la Sécurité (PARSS 3) vise notamment à renforcer les capacités de la Direction Générale de la Protection Civile, à moderniser les casernements et à professionnaliser les sapeurs-pompiers. L’appui à l’École Nationale de Police et de Protection Civile permet aussi d’améliorer la formation continue des agents.
Ces efforts doivent être amplifiés et intégrés dans une stratégie nationale globale, associant acteurs publics, privés et société civile, pour bâtir un système résilient capable de protéger efficacement la population.
Conclusion
La sécurité incendie et la protection civile ne sont pas des luxes réservés aux pays développés : elles constituent un pilier fondamental de la souveraineté nationale, de la stabilité sociale et du développement économique durable.
La Guinée doit faire de la modernisation de sa protection civile une priorité stratégique, en investissant dans les infrastructures, les ressources humaines et la prévention. C’est ainsi que nous protégerons les vies, préserverons nos acquis et garantirons un avenir sûr et prospère à nos concitoyens.
Mohamed KOUYATÉ, Expert en sécurité incendie
L’article Moderniser la sécurité incendie et la protection civile en Guinée : une question de souveraineté nationale [Par Mohamed Kouyaté] est apparu en premier sur Mediaguinee.com.