La corruption dans la gestion hospitalière en Guinée : une urgence capitale [Par Dr Karamo Kaba]

il y a 5 heures 30
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La corruption qui gangrène le secteur de la santé en Guinée n’est pas un phénomène isolé. Elle reflète des failles profondes, ancrées dans l’organisation même de notre système de santé publique, où les dysfonctionnements s’accumulent au détriment des patients.

Aujourd’hui, notre système sanitaire peine à répondre aux attentes croissantes des populations, que ce soit en termes de disponibilité de médicaments, d’équipements médicaux ou de qualité des soins.

Cette crise est particulièrement visible hors des grandes agglomérations, où l’on constate un cruel manque de personnel qualifié, des frais médicaux exorbitants, des infrastructures délabrées, et une corruption devenue presque routinière.

Ce mal endémique s’enracine dans un fonctionnement opaque, à la croisée de savoirs techniques spécifiques (pratiques médicales) et d’une administration peu rigoureuse.

L’exemple est frappant : lorsque certains hôpitaux se félicitent encore de la réussite d’interventions chirurgicales simples comme une appendicectomie ou une hystérectomie, cela en dit long sur l’état d’esprit général. Cela traduit un manque d’ambition scientifique et médicale.

Ces réalités sont connues, tant des autorités que des citoyens. Dans les hôpitaux publics, les plaintes des patients sont légion : qualité de service, accueil glacial, traitement inégal selon le statut ou les moyens du patient. Les mots qui reviennent le plus souvent ? « Ils ne nous regardent même pas. Ils ne pensent qu’à l’argent et à leurs proches. »

Lors d’un passage dans un hôpital public de la Haute Guinée, une patiente m’a confié : « Docteur, ici, si tu n’as pas d’argent, tu n’existes pas. Je suis avec mon mari malade depuis cinq semaines. J’essaie de rencontrer le directeur qui est médecin depuis trois semaines, mais il est plus facile de voir le Président Mamadi Doumbouya que lui. C’est triste, mais je sais que je ne suis pas la seule. ».

Cette déclaration, aussi poignante que révélatrice, illustre le fossé qui sépare le personnel hospitalier des malades dans certains établissements.

Pourtant, les budgets alloués au secteur sont loin d’être dérisoires. Depuis 2021, sous l’impulsion du Président Mamadi Doumbouya, le ministère de la Santé et de l’Hygiène publique a vu ses ressources considérablement augmentées :

-En 2023, plus de 2 035 milliards de GNF ont été injectés dans le secteur.
-En 2024, ce montant a grimpé à près de 2 186 milliards.
-Et en 2025, la Loi de Finances Initiale prévoit plus de 2 247 milliards de GNF.

À ces ressources internes s’ajoute l’appui constant de partenaires techniques internationaux, dont l’Organisation mondiale de la Santé. Alors, légitimement, on peut se demander : où va tout cet argent ? Pourquoi la situation reste-t-elle aussi préoccupante ?

La mauvaise gouvernance des hôpitaux publics reste au cœur du problème. Trop souvent, la transparence est reléguée au second plan, et la logique de résultats peine à s’imposer.

Pour casser cette spirale, des réformes courageuses doivent voir le jour. En voici quelques-unes :

  1. Digitaliser intégralement les services hospitaliers, en supprimant le paiement en espèces et en favorisant les transactions électroniques.
  2. Valoriser le capital humain par des formations continues, des bourses de spécialisation à l’étranger et une revalorisation des conditions de travail.

  3. Renforcer les inspections sanitaires pour obliger les personnels à plus de rigueur et de respect du serment d’Hippocrate.

  4. Former les directeurs d’hôpitaux en leadership, gestion et éthique publique : leur rôle dépasse la médecine ; ils doivent être des gestionnaires visionnaires.

  5. Investir massivement dans la rénovation et la construction d’infrastructures modernes dans les 8 régions administratives et à Kissidougou comme 9 régions, capables de garantir un service de qualité à tous, sans distinction.

Pour faire aboutir ces pistes, un leadership affirmé est nécessaire. Le ministre de la Santé et de l’Hygiène publique doit incarner cette volonté de changement, avec lucidité, fermeté et intégrité.

Il est temps que la santé cesse d’être une source de frustration pour les Guinéens et devienne enfin ce qu’elle doit être : un droit, et non un privilège.

Dr. KABA KARAMO
Spécialiste en Santé Publique et Prévention.

Auteur des ouvrages :

« Au Prix de la Vocation »
« Les Secrets du Couple »
« Prévalence des Helminthiases intestinales à l’hôpital préfectoral de Siguiri ».

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