Pégui, la voix de ceux qu’on fait taire : « Monologuer », un cri d’exil contre le silence imposé

il y a 4 heures 14
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Installé à Dakar, au Sénégal, après avoir fui des menaces en Guinée, le journaliste et artiste engagé Pépé Guilavogui, alias Pégui 224, dénonce la confiscation de la parole publique dans son tout premier clip musical. Monologuer, c’est la voix d’un peuple condamné à parler seul.

Un exil forcé, un combat assumé

« Je peux dire, en quelque sorte, que je suis en exil à Dakar. »

Ce constat amer de Pépé Guilavogui résume à lui seul l’atmosphère politique qui règne aujourd’hui en Guinée. Journaliste de formation, diplômé du CESTI de Dakar, Pépé – connu sous le nom de scène Péguy – a dû quitter Conakry en urgence après avoir dénoncé un chantier illégal sur une plage publique. Un acte de civisme qui lui a valu des menaces sérieuses.

Installé aujourd’hui au Sénégal, son pays d’adoption, il a décidé de transformer cette épreuve en œuvre de création. Le 24 mai dernier, il a sorti Monologuer, un single coup-de-poing, accompagné d’un clip percutant. Sa voix porte haut celle des opprimés : journalistes réduits au silence, activistes arrêtés pour un simple avis contraire.

Monologuer : une musique, une mémoire collective

« Monologuer est un concept très chargé. Il décrit une société où le peuple est réduit à parler seul, pendant que les puissants se répondent entre eux. »

Dans ce morceau, le mot « je » n’est pas égoïste : il est collectif. Il représente un peuple privé de parole depuis l’indépendance, passé de régime en régime sans jamais gagner en liberté.

Pépé retrace dans sa chanson les grandes périodes de la répression politique en Guinée : du régime de Sékou Touré, de Lansana Conté, à celui du général Mamadi Doumbouya. Toujours les mêmes pratiques autoritaires, toujours les mêmes promesses trahies.

« Les personnes changent, mais les méthodes restent les mêmes », déplore-t-il.

La musique comme journalisme alternatif

Pour Pépé Guilavogui, l’art est un levier politique. Il refuse le silence.

« Le journalisme traditionnel a du mal à impacter aujourd’hui. Associer la musique à la communication, c’est une approche innovante pour éveiller les consciences. »

Monologuer est une œuvre hybride : à la fois chanson, chronique sociale et hommage. Il y rend hommage à des confrères disparus ou emprisonnés : Foniké Menguè, Billo Bah, Habib Marouane Camara, ainsi qu’à sa mère adoptive, feue Eugénie Rokaya, ancienne directrice du CESTI.

Un cri contre la confiscation des libertés

Au-delà du son, le message est clair : Monologuer est un acte de résistance. Péguy y dénonce les graves atteintes aux libertés fondamentales : fermetures de médias privés comme FIM, Hadafo Médias ou Djoma, arrestations arbitraires, militarisation du discours public.

« Cette transition ne tient plus ses promesses. Le serment est violé. Et pourtant, un militaire, c’est la parole donnée », rappelle-t-il avec amertume.

L’exil comme refuge, mais jamais comme abandon

Aujourd’hui basé à Dakar, Pépé observe la situation en Guinée avec lucidité. Il espère un sursaut, un dialogue franc entre les forces vives du pays. En attendant, il continue de s’exprimer, coûte que coûte.

« On ne souhaite pas l’exil à quelqu’un. Mais je préfère l’exil à la disparition. »

Avec Monologuer, il nous rappelle que la liberté d’expression n’est jamais acquise. Et que tant qu’il y aura des voix pour chanter l’injustice, le silence ne gagnera jamais tout à fait.

MediaGuinee

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