La France met fin à plus de six décennies de présence militaire permanente au Sénégal

il y a 8 heures 31
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Après plus de six décennies de présence militaire française continue, les deux dernières installations militaires françaises au Sénégal viennent d’être officiellement restituées, jeudi 17 juillet, lors d’une cérémonie militaire au camp Geille, la plus vaste base militaire au centre de Dakar. Cela marque la fin de la présence permanente de l’armée française au Sénégal. Ce passage sous drapeau sénégalais est tout un symbole.

Au son de l’hymne national, le drapeau vert, jaune et rouge du Sénégal a été hissé sur la place d’arme du camp Geille à la place du drapeau français. Tout un symbole. Ce camp, situé au cœur de la capitale en plein centre-ville dans le quartier Ouakam, est la plus vaste des six emprises que l’armée française avait encore à Dakar avec cinq hectares. Mais c’était aussi la dernière base militaire française en Afrique de l’Ouest qui a fermé ce jeudi – tout comme l’escale militaire française située à l’aéroport de Dakar, signe de la reconfiguration globale de la coopération de défense entre la France et l’Afrique.

Le chef d’état-major de l’armée sénégalaise, le général Mbaye Cissé, et le général Pascal Ianni à la tête du commandement de l’armée française pour l’Afrique, se tenaient côte à côte face au drapeau avant une remise de clef symbolique. Une clef un peu ancienne qui marque la passation de la dernière base militaire française ici sous commandement sénégalais.

« C’est un tournant important dans le riche et long parcours de coopération entre le Sénégal et la France » a affirmé le chef d’état-major de l’armée sénégalaise, le général Mbaye Cissé qui a évoqué « la nouvelle doctrine de défense » voulu par les nouvelles autorités, celle d’un partenariat fondé sur la souveraineté de chaque pays. « Une nouvelle étape » et « un changement nécessaire » a affirmé de son côté le général français Pascal Ianni. « Nous devons réinventer nos partenariats face à la jeunesse » a-t-il dit.

Pour le Sénégal ce départ marque le point final d’une présence permanente de l’armée française dans le pays depuis l’époque coloniale, comme l’explique le professeur d’histoire à l’université Cheikh Anta Diop, Mor Ndao : « Ce sont des éléments qui sont en permanence au Sénégal depuis le XIXe siècle, depuis la période coloniale, qui se sont consolidés depuis cent cinquante ans. Que cela soit remis en question constitue tout un symbole. C’est une période très importante dans l’histoire de la coopération militaire entre la France et le Sénégal. »

Le chef d’état-major sénégalais et le chef du commandement de l’armée française pour l’Afrique sont assis côte à côte au bout du tapis rouge lors de la cérémonie officielle de remise de la dernière base française au Sénégal, le 17 juillet 2025 à Dakar.Le chef d’état-major sénégalais et le chef du commandement de l’armée française pour l’Afrique sont assis côte à côte au bout du tapis rouge lors de la cérémonie officielle de remise de la dernière base française au Sénégal, le 17 juillet 2025 à Dakar. © Léa-Lisa Westerhoff / RFI

Des discussions dès 2022

La coopération avec l’armée française a évolué ces 60 dernières années. En 1960,date de la signature du premier accord de coopération, juste après l’indépendance et jusqu’en 2011, l’armée française s’engage à appuyer « la construction de l’armée sénégalaise » et à défendre le Sénégal en cas d’agression extérieure. À partir de 2011 et une premièreréduction importante de la présence de militaire français au Sénégal, les forces françaises du Cap-Vert deviennent les éléments français au Sénégal dont la vocation n’est plus de défendre le Sénégal, mais d’assurer des formations et des entraînements conjoints.

Cette fin de la présence française au Sénégal – qui arrive alors que les bases militaires françaises ont fermé en janvier 2025 au Tchad et en Côte d’Ivoire en février 2025 – c’est le fruit de discussions. « Un dialogue apaisé et constructif » qui a démarré avec le Sénégal dès 2022, explique l’armée française qui dit avoir compris dès 2021 la nécessité de faire évoluer sa présence militaire en Afrique. « On avait un vrai problème de perception », affirme une source militaire française. Le départ des militaires français était une demande ancienne de la gauche sénégalaise et une promesse de campagne du Pastef, actuellement au pouvoir.

Au Sénégal, dans un premier temps, en 2023, l’armée française a commencé à réduire le nombre de ses militaires présents en permanence dans le pays et préparé le transfert de certaines de ses bases. La transformation du camp Geille, qui ferme aujourd’hui, en une base qui abrite un poste de formation franco-sénégalais a été un temps envisagé, puis abandonné.

Une coopération qui continue

L’arrivée au pouvoir, il y a un peu plus d’un an, du Pastef, et la demande du président en décembre 2025 que toutes les bases étrangères militaires au Sénégal ferment, ont formalisé le processus en cours. À partir de janvier, une commission mixte franco-sénégalaise a défini le calendrier des rétrocessions qui ont commencé le 7 mars. Quatre bases ont déjà été rétrocédées. Les deux dernières emprises, l’une à Ouakam et l’autre à l’aéroport, passeront sous drapeau sénégalais ce jour même.

Aujourd’hui, des deux côtés, français et sénégalais, on insiste pour dire qu’il ne s’agit pas d’une rupture mais « d’un nouveau partenariat ». La coopération militaire entre les deux pays va continuer, ce seront des formations toujours. Mais au lieu d’avoir des militaires français à disposition basés à Dakar, ils seront envoyés de Paris en fonction des demandes de formation. La surveillance maritime en mer et la cybercriminalité sont quelques-uns des sujets évoqués.

La rétrocession de la dernière base française au Sénégal marque en tout cas la fin de la présence permanente de l’armée française en Afrique de l’Ouest. Il reste une emprise franco-gabonaise à Libreville et une base militaire française à Djibouti.

Avec RFI

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