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Silencieux mais redoutable, le cancer du col de l’utérus est la deuxième cause de cancer chez la femme, après le cancer du sein. Alors qu’il pourrait être évité dans la majorité des cas, en Guinée, faute d’information et de moyens de dépistage, la maladie progresse dans l’ombre. Dans un entretien accordé à Guinee360, le Dr Ben Youssouf Keita, médecin généraliste et chirurgien, lève le voile sur les causes, les signes précoces et les solutions de prévention de ce fléau trop longtemps ignoré.
Guinee360 : Pouvez-vous nous expliquer ce qu’est exactement le cancer du col de l’utérus ?
Dr Ben Youssouf Keita : Le cancer du col de l’utérus est une maladie qui se développe au niveau du col, c’est-à-dire la partie inférieure de l’utérus qui s’ouvre dans le vagin. Il est provoqué par une multiplication anormale et incontrôlée de cellules dans cette zone, ce qui entraîne la formation d’une tumeur maligne. Dans la majorité des cas, ce cancer est lié à une infection persistante par certains types du virus du papillome humain (HPV), transmis principalement par voie sexuelle. Le cancer du col de l’utérus est aujourd’hui la deuxième cause de cancer chez la femme, après le cancer du sein. Il représente donc un véritable enjeu de santé publique, notamment dans les pays en développement où le dépistage et la vaccination contre le HPV sont encore peu accessibles.
Quelles sont les principales causes du cancer du col de l’utérus chez la femme ?
La principale cause du cancer du col de l’utérus est l’infection par le virus du papillome humain (HPV), en particulier certains types à haut risque comme le HPV 16 et 18. Ce virus est transmis principalement par voie sexuelle. Toutes les femmes qui entament une vie sexuelle peuvent être exposées à ce virus, sans exception. Dans la grande majorité des cas, le système immunitaire parvient à éliminer spontanément le virus sans qu’il ne provoque de dommages. Cependant, chez certaines femmes, l’infection persiste. C’est cette persistance, sur plusieurs années, qui peut entraîner des lésions précancéreuses puis évoluer vers un cancer du col si elle n’est pas détectée et traitée à temps. Des facteurs comme le début précoce des rapports sexuels, les partenaires sexuels multiples, le tabagisme, un système immunitaire affaibli (notamment chez les femmes vivant avec le VIH, ou encore l’absence de dépistage régulier, augmentent le risque de développer ce cancer.
Quels sont les signes précoces du cancer du col de l’utérus ?
Le cancer du col de l’utérus évolue généralement de façon silencieuse, sans douleur ni symptômes apparents dans ses débuts. C’est pourquoi on dit qu’il se développe de manière insidieuse. Cependant, l’un des premiers signes précoces est le saignement pendant ou après les rapports sexuels. Ce symptôme, souvent négligé, doit alerter. D’autres signes peuvent inclure des saignements vaginaux anormaux, notamment en dehors des périodes de menstruation, ou après la ménopause. Parfois aussi, des pertes vaginales inhabituelles (abondantes, malodorantes ou teintées de sang) peuvent apparaître. Dans certains cas, c’est au cours d’un examen gynécologique de routine, comme le frottis ou une inspection visuelle du col, que des lésions précancéreuses sont détectées avant même l’apparition de symptômes. C’est pourquoi, le dépistage régulier est essentiel pour repérer le cancer à un stade précoce, où il est plus facile à traiter.
Est-il possible de prévenir le cancer du col de l’utérus ?
Oui, il est tout à fait possible de prévenir le cancer du col de l’utérus grâce à plusieurs mesures efficaces. La première méthode, c’est la vaccination contre le virus HPV (Papillomavirus Humain). Cette vaccination est recommandée chez les jeunes filles dès l’âge de 9 à 11 ans, idéalement avant le début de l’activité sexuelle, car elle protège contre les types de HPV les plus à risque, responsables de la majorité des cancers du col. La deuxième méthode de prévention, c’est le dépistage régulier. À partir de 25 ans, toute femme sexuellement active devrait faire un frottis cervico-utérin (ou test HPV) tous les 3 à 5 ans, selon les recommandations. Et à partir de 30 ou 40 ans, il est conseillé de consulter au moins une fois par an son gynécologue pour un examen clinique du col à l’aide d’un spéculum, permettant de détecter d’éventuelles lésions précancéreuses. Si nécessaire, un prélèvement (biopsie) peut être fait pour confirmer ou écarter un risque. Enfin, un bilan de santé annuel, incluant des examens sanguins tels que l’hémogramme complet et la vitesse de sédimentation, peut aussi aider à surveiller l’état général de santé et détecter indirectement une inflammation ou une anomalie. Ces trois démarches combinées permettent de réduire fortement le risque de développer un cancer du col de l’utérus ou de le traiter précocement.
Quelles peuvent être les conséquences du cancer du col de l’utérus sur la santé de la femme?
Les conséquences du cancer du col de l’utérus peuvent être graves, surtout s’il n’est pas diagnostiqué et pris en charge à temps. Au début, le cancer peut évoluer sans symptômes visibles. Mais s’il progresse, il peut provoquer des saignements anormaux, des douleurs pelviennes persistantes, des pertes vaginales inhabituelles et des douleurs pendant les rapports sexuels. Ces signes peuvent affecter la qualité de vie de la femme et impacter sa vie intime et émotionnelle. À un stade avancé, le cancer peut envahir les organes voisins comme la vessie, le rectum ou les uretères, entraînant des complications urinaires ou digestives. Il peut aussi se propager à distance, notamment aux poumons, au foie ou aux os : c’est ce qu’on appelle les métastases. Une fois le cancer métastasé, le traitement devient plus complexe, et le pronostic vital est souvent engagé. Si rien n’est fait, le cancer du col de l’utérus peut conduire au décès. D’où l’importance du dépistage régulier et de la vaccination pour prévenir cette maladie évitable.
Pourquoi le dépistage précoce est-il important ?
Le dépistage précoce est essentiel car toutes les femmes sexuellement actives, sans exception, sont exposées au papillomavirus humain (HPV), principal responsable du cancer du col de l’utérus. Même lors du tout premier rapport sexuel, une femme peut contracter ce virus. Heureusement, dans la majorité des cas, le système immunitaire élimine naturellement le virus. Mais chez certaines femmes, le HPV persiste, et peut provoquer avec le temps des lésions précancéreuses, puis un cancer si rien n’est fait. C’est pourquoi il est fortement recommandé, même en l’absence de symptômes comme des saignements après les rapports, de faire régulièrement un dépistage du col de l’utérus. Ce dépistage consiste à faire un frottis cervico-utérin ou un test HPV, qui permet de détecter très tôt toute anomalie. Ce test est simple, rapide, indolore et souvent gratuit dans les centres de santé. Il est conseillé de le faire tous les 3 ans, ou chaque année si un facteur de risque est présent. Un dépistage régulier permet de traiter précocement toute anomalie avant qu’elle ne devienne cancéreuse, ce qui sauve des vies.
En dehors du dépistage, existe-t-il d’autres moyens de prévenir le cancer du col de l’utérus ?
Plusieurs mesures peuvent contribuer à prévenir le cancer du col de l’utérus. La première, c’est éviter de fumer, car le tabac affaiblit le système immunitaire et favorise la persistance du virus HPV, principal responsable de ce cancer. Ensuite, il est important de connaître ses antécédents familiaux. Si votre mère, votre sœur, votre tante ou votre grand-mère a souffert d’un cancer du col ou d’un autre cancer gynécologique, cela peut indiquer une prédisposition, même si le cancer du col de l’utérus n’est pas héréditaire au sens strict. Il existe une susceptibilité, mais ce n’est pas comme des maladies génétiques telles que la drépanocytose ou l’asthme. Il est donc recommandé d’effectuer une visite annuelle chez le gynécologue, surtout à partir du moment où la femme devient sexuellement active. Le médecin peut alors examiner l’état du col de l’utérus à l’aide d’un spéculum, et proposer des tests comme le frotti cervico-utérin ou un test HPV pour détecter les éventuelles anomalies. Enfin, si une lésion est détectée à temps, des traitements simples peuvent permettre une guérison complète. L’essentiel, c’est d’agir tôt.
Qu’en est-il, par exemple, des relations sexuelles protégées? Est-ce que cela peut quand même entraîner un cancer du col de l’utérus ?
Non, ce n’est pas le rapport sexuel en lui-même qui cause le cancer du col de l’utérus. En réalité, les femmes sexuellement actives ne sont pas forcément plus exposées que celles qui ne le sont pas. Ce qu’il faut comprendre, c’est que le cancer du col est principalement lié à une infection persistante par certains types du virus HPV (papillomavirus humain). Le HPV se transmet lors de rapports sexuels, y compris lors du tout premier rapport. Il existe plus de 100 types de papillomavirus, mais seuls deux types à haut risque (notamment les types 16 et 18) sont fortement associés au cancer du col de l’utérus. Le préservatif peut réduire le risque de transmission, mais ne l’élimine pas totalement, car le HPV peut se transmettre par simple contact peau à peau au niveau génital. Il est donc possible de contracter le virus même lors de rapports protégés. Il est aussi important de préciser que la majorité des femmes éliminent naturellement le virus sans complication. Mais si le virus persiste, il peut provoquer des lésions qui, non traitées, évoluent en cancer. C’est pourquoi le dépistage régulier reste indispensable, même en l’absence de symptômes.
Que doivent faire les autorités pour améliorer la prise en charge des femmes atteintes du cancer du col de l’utérus ?
Déjà, le dépistage précoce est gratuit, mais il reste peu accessible pour une grande partie de la population féminine. Il faut donc mieux informer les femmes, faire plus de sensibilisation et surtout rendre le dépistage disponible dans tout le pays. Même si cela n’est pas faisable immédiatement dans tous les centres de santé, au moins les hôpitaux régionaux devraient pouvoir le proposer de façon régulière. Ensuite, lorsqu’une femme est diagnostiquée avec un cancer du col de l’utérus, la prise en charge doit être allégée, voire subventionnée par l’État, car les coûts du traitement sont souvent trop élevés pour les patientes. Cela permettra non seulement de sauver des vies, mais aussi de réduire les complications graves liées à un diagnostic tardif.
Quel appel avez-vous à lancer à l’endroit des jeunes filles et des femmes ?
D’abord, évitez la consommation d’alcool et surtout de cigarette, car cela affaiblit le système immunitaire de la femme. Or, lorsque l’immunité est réduite, le papillomavirus a plus de chances de se développer et d’évoluer vers un cancer. Ensuite, dès qu’une femme remarque un saignement anormal, aussi minime soit-il, en dehors des menstruations ou surtout pendant les rapports sexuels, elle doit consulter un gynécologue sans attendre. Enfin, il est essentiel de mener une vie saine. Cela passe par l’abandon des vices mentionnés, la limitation du nombre de partenaires sexuels, et la réalisation régulière de dépistages. À partir de 40 ans, chaque femme devrait faire un prélèvement du col de l’utérus au moins une fois par an pour détecter toute lésion à un stade précoce.
L’article Dr Ben Youssouf Keita : “Le cancer du col de l’utérus est évitable, mais touche encore trop de femmes” est apparu en premier sur Guinee360 - Actualité en Guinée, Politique, Économie, Sport.