Sécurité routière en Guinée : l’heure d’un sursaut national pour enrayer l’hécatombe (Par Mohamed Kouyaté)

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La fête de l’Aïd El-Kébir (Tabaski), moment de spiritualité et de rassemblement familial, a de nouveau été endeuillée par une série dramatique d’accidents à travers la Guinée. Selon les chiffres officiels publiés le 11 juin 2025, le pays a enregistré 12 morts et 48 blessés, malgré un impressionnant dispositif sécuritaire déployé sur l’ensemble du territoire.

À peine 24 heures plus tard, ce jeudi 12 juin 2025, un autre drame est venu noircir le tableau : un accident d’une extrême violence sur l’autoroute Fidel Castro à Conakry, impliquant un motard et un véhicule pick-up. Le choc a causé un mort, plongeant de nouveau des familles dans le deuil et l’indignation.

Ce bilan tragique n’est plus une exception : il est devenu la norme lors de chaque grande fête ou période de mobilité intense. Ce n’est plus une coïncidence, mais bien le symptôme d’un système défaillant, d’une sécurité routière à bout de souffle.

Un problème systémique, pas seulement comportemental

De toute évidence, au-delà des comportements à risque, l’ampleur des drames routiers en Guinée révèle une crise structurelle profonde. Les carences dans l’apprentissage de la conduite, la signalisation quasi inexistante, l’absence de radars, la tolérance aux infractions, et le manque criant de contrôle d’alcoolémie et de psychotropes sur les routes traduisent une situation alarmante.

Autrement dit, la route tue silencieusement. Et nous restons collectivement dans le déni.

Refonder la sécurité routière : cinq priorités d’action

Face à cette urgence nationale, il est impératif de reconstruire la politique de sécurité routière autour d’un socle solide. Cela passe par une approche globale, cohérente et rigoureuse. Voici cinq axes prioritaires à mettre en œuvre immédiatement :

1. Réformer en profondeur le système de formation et de délivrance du permis

Tout d’abord, il convient de revoir en profondeur les mécanismes d’apprentissage à la conduite.

Les conditions de passage du code de la route et des examens pratiques doivent être renforcées.
Les auto-écoles doivent être soumises à un agrément strict et à des contrôles réguliers.
Enfin, l’introduction d’un permis à points permettrait de responsabiliser davantage les conducteurs et de sanctionner les récidives.

2. Contrôler, sanctionner, dissuader

En parallèle, le renforcement des dispositifs de contrôle s’impose.

Il est urgent de déployer des contrôles d’alcoolémie et des tests de dépistage des stupéfiants sur les routes, notamment en périodes festives.
L’installation de radars fixes et mobiles pour traquer les excès de vitesse doit être généralisée.
Les sanctions doivent être immédiates, proportionnées et exemplaires : suspension du permis, amendes, mise en fourrière, etc.

3. Sécuriser les infrastructures

Toutefois, la meilleure conduite ne peut rien sans une infrastructure adaptée.

Il est indispensable de généraliser le balisage horizontal et vertical sur toutes les routes urbaines et interurbaines.
Les grands axes doivent être dotés de feux tricolores intelligents, de ralentisseurs réglementés et de trottoirs sécurisés dans les zones sensibles.
L’éclairage public doit être renforcé, notamment dans les zones accidentogènes.

4. Éduquer et sensibiliser durablement

Au-delà de l’action coercitive, l’éducation à la sécurité routière doit devenir un pilier de la prévention.

Elle doit commencer dès l’école primaire, et se prolonger dans l’enseignement professionnel.
Les campagnes de sensibilisation doivent être régulières, ciblées et relayées par les médias, les leaders religieux, les artistes et les influenceurs.
Une Semaine nationale de la sécurité routière, organisée chaque année avant les périodes à risque, pourrait créer une mobilisation collective.

5. Créer une gouvernance nationale dédiée

Enfin, toute réforme sérieuse suppose une gouvernance efficace et des données fiables.

Il est temps de mettre en place un Observatoire National de la Sécurité Routière, chargé de collecter, analyser et publier les statistiques.
Chaque année, un rapport officiel sur la situation devrait être présenté devant l’Assemblée nationale.
Les collectivités locales doivent également jouer leur rôle à travers des Comités Locaux de Sécurité Routièrecapables d’agir à l’échelle territoriale.

Agir maintenant, ou continuer à compter nos morts

En somme, la sécurité routière n’est pas un luxe. C’est un impératif national et une condition de dignité collective.

Il n’est pas normal qu’une fête religieuse se solde par 12 morts et 48 blessés.

Le moment est venu pour la Guinée d’oser une politique nationale forte de sécurité routière, avec des lois appliquées, des infrastructures modernisées, des contrôles rigoureux et une conscience collective renouvelée.

« La route ne tue pas. Ce sont nos choix qui la rendent meurtrière. »

Faisons désormais les bons choix.

Kouyaté Mohamed 

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