Présidentielle 2025 : la DGE, une solution pragmatique en porte-à-faux avec la Constitution

il y a 2 heures 17
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À moins de trois mois de la présidentielle de 2025, la Guinée s’apprête à organiser un scrutin sans l’organe électoral prévu par sa nouvelle Constitution. Entre l’intérim de la DGE, la hiérarchie des normes et les réserves des acteurs politiques, la légitimité du processus interroge.

La nouvelle Constitution guinéenne consacre, dans ses articles 174 et 175, la création d’un Organe technique indépendant de gestion des élections (OTIGE), chargé d’assurer la transparence et l’intégrité des scrutins. Mais à ce jour, cet organe n’existe toujours pas.

Pour combler ce vide, le nouveau Code électoral, promulgué mais pas encore publié au Journal officiel, a prévu une disposition transitoire : l’article 341 confie provisoirement les missions de l’OTIGE à la Direction générale des élections (DGE), sous tutelle du Ministère de l’Administration du Territoire et de la Décentralisation (MATD), en collaboration avec l’ONASUR.

Nombre d’acteurs politiques et de juristes y voient une entorse à la nouvelle architecture constitutionnelle, qui confie expressément la gestion électorale à un organe indépendant, non à une structure administrative placée sous l’exécutif.

Dansa Kourouma l’avait pourtant prévenu

Face à la controverse, le président du Conseil national de la transition (CNT), Dr Dansa Kourouma, avait pourtant prévenu lors d’une conférence de presse tenue le 29 juin 2025 à Conakry. Rappelant les principes de la hiérarchie des normes, il avait déclaré : « C’est le décret qui doit s’adapter à la Constitution, pas l’inverse.» Selon lui, la création de la DGE relève des prérogatives réglementaires du président de la République. « Le chef de l’État agit dans le cadre de ses compétences d’organisation de l’administration et des pouvoirs publics. Ce décret est donc légal. Cependant, après la promulgation de la nouvelle Constitution, toute disposition non conforme devra être harmonisée. (…) Ce n’est pas parce qu’elle n’est pas inscrite dans la Constitution qu’elle est illégale. Elle répond à un besoin immédiat de structuration du processus électoral. Dès que l’OTIGE sera mis en place, il reprendra ses prérogatives.»

Une déclaration qui visait à calmer les inquiétudes et à replacer la DGE dans un cadre d’attente légale, en attendant la mise en œuvre pleine de la réforme constitutionnelle.

Du parallélisme des normes

Sur le plan juridique, toutefois, le principe du parallélisme des normes demeure incontournable : une norme constitutionnelle ne peut être suspendue ou remplacée que par une autre de même valeur juridique. Autrement dit, une disposition du Code électoral ou un décret présidentiel ne peuvent, en théorie, supplanter la Constitution.

À ce flou juridique s’ajoute un soupçon politique. La DGE est loin d’être perçue comme neutre : elle avait organisé le référendum constitutionnel du 21 septembre, massivement boycotté par les principaux partis politiques. Cette expérience alimente la méfiance de l’opposition et de la société civile, qui voient en elle un prolongement administratif du pouvoir exécutif, plutôt qu’un organe technique impartial.

En confiant la présidentielle du 28 décembre à une structure contestée, la transition prend un pari institutionnel et politique audacieux : celui de privilégier la faisabilité immédiate sur la conformité constitutionnelle.

Mais cette solution temporaire, même justifiée par le pragmatisme, risque de fragiliser la légitimité du scrutin et d’alimenter d’éventuels contentieux électoraux.

Le débat autour de la DGE illustre les tensions de la période transitoire : entre la lettre de la Constitution, le retard dans les réformes institutionnelles, et la volonté d’avancer vers un retour à l’ordre constitutionnel. La véritable question reste celle-ci : peut-on garantir un scrutin crédible avec un organe jugé partisan, au moment même où la Constitution prône l’indépendance de la gestion électorale ?

En attendant la mise en place de l’OTIGE, la DGE incarne une solution transitoire sous haute surveillance, à la fois légale, mais politiquement fragile aux yeux des principaux acteurs du processus électoral.

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