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En Guinée, les accidents de la route deviennent de plus en plus récurrents ces derniers temps. Chaque jour que Dieu fait, des familles sont endeuillées par des incidents qui surviennent en pleine circulation.
Les cas de morts et de blessés s’accentuent, et les dégâts matériels sont également importants. Au-delà des pertes humaines, certains accidents causent des handicapés à vie.
Selon le dernier bilan publié par le ministère des Transports à travers l’Agence Guinéenne de la Sécurité Routière (AGUISER), 1 278 accidents ont été recensés au cours du premier semestre 2025 dans les huit régions administratives du pays.
Ces accidents ont entraîné 165 décès, 302 blessés graves, 346 blessés légers, ainsi que 334 cas de dégâts matériels importants. De plus, 304 motos étaient impliquées dans ces accidents et 71 dossiers ont été déférés au parquet.
Pour mieux comprendre le phénomène, ses causes et les moyens de prévention, nous sommes allés à la rencontre des experts du domaine.
Dans un entretien accordé à notre rédaction ce mardi 7 octobre 2025, le Directeur Général Adjoint de l’AGUISER et Contrôleur Général de police, Yéké Bérété, a largement expliqué les facteurs contribuant à ces accidents et les mesures à prendre pour protéger la population.
Lisez l’intégralité de l’interview :
Mosaiqueguinee.com : Ces derniers temps, la Guinée enregistre une recrudescence d’accidents de la route. Comment expliquez-vous cette situation ? Quelles sont, selon vous, les principales causes de ces drames ?
Yéké Bérété : Cette situation s’explique par les réalités de chez nous. D’abord, il y a plusieurs facteurs qui contribuent à ces accidents. Le premier, et sans doute le plus important, c’est l’être humain : le conducteur par excellence, qui en réalité ne respecte pas le code de la route. Beaucoup obtiennent de façon frauduleuse le document qui les autorise à conduire, c’est-à-dire le permis de conduire. Certains conduisent des véhicules qui ne sont pas en bon état, dépourvus de certificat de visite technique. La majorité des véhicules utilisés en Guinée ne sont pas neufs, sauf ceux de l’administration. Ce sont souvent des véhicules de deuxième ou troisième main, notamment dans le transport en commun.
À cela s’ajoute le manque de contrôle rigoureux. Chez nous, le social prime sur la loi. Pourtant, pour nous, techniciens de la sécurité routière, il n’y a pas d’accident sans cause. Les gens attribuent souvent les accidents à Dieu ou au destin, mais la réalité est autre : c’est souvent l’excès de vitesse, le manque de compétence du conducteur, les problèmes techniques du véhicule ou la fatigue du conducteur.
Comment compilez-vous et suivez-vous les statistiques relatives aux accidents de la route ?
Nous suivons la situation de près. C’est nous qui compilons les données collectées par la police et la gendarmerie. Nous disposons d’une base de données fiable que nous pouvons fournir sur demande ou en cas de besoin.
Le comportement des conducteurs est souvent pointé du doigt. En vous écoutant, nous comprenons qu’il s’agit d’une cause dominante, n’est-ce pas ?
Effectivement. Le comportement des conducteurs est une cause majeure. C’est pourquoi nos recommandations urgentes portent d’abord sur la formation et la sensibilisation. Nous faisons déjà beaucoup de campagnes pour éduquer les usagers de la route, mais la répression doit accompagner ces efforts. Si le conducteur sait qu’après une infraction, des sanctions réelles sont appliquées (suspension ou annulation du permis), il fera plus attention à sa conduite. Malheureusement, nous constatons que même des conducteurs impliqués dans des accidents graves, avec des pertes en vies humaines, se retrouvent à nouveau sur la route après un ou deux jours. Dans ces conditions, on ne pourra jamais réduire les accidents.
À votre avis, que faudrait-il faire pour instaurer une véritable culture de sécurité routière en Guinée ?
Le gouvernement travaille déjà à trouver des solutions durables. Une mesure importante est le renouvellement du parc automobile. L’État crée des conditions favorisant l’importation de véhicules neufs, ce qui est un grand pas.
Ensuite, il faut réaménager les conditions de délivrance des permis de conduire, pour s’assurer que seuls ceux qui ont reçu la formation adéquate puissent conduire.
Enfin, il faut poursuivre les campagnes de sensibilisation et promouvoir les moyens de prévention : respecter les limitations de vitesse, ne pas conduire en état de fatigue ou sous l’influence de l’alcool, bien entretenir son véhicule et s’assurer que celui-ci dispose des documents réglementaires. Beaucoup de conducteurs oublient qu’un accident ne cause pas seulement des dommages aux autres, mais leur fait aussi perdre leur source de revenus, car un véhicule détruit, c’est une activité arrêtée. Nous demandons donc que les sanctions soient maintenues et que le contrôle routier soit renforcé.
Pour terminer, quel message avez-vous à l’endroit de la population guinéenne ?
Le message que je lance toujours est simple : la vie est précieuse. Être à l’origine de la mort d’une ou plusieurs personnes enlève toute raison de vivre. La route doit être un espace de respect mutuel. Chaque citoyen doit respecter les règles de circulation. Les panneaux sont là pour informer, guider et orienter. Malheureusement, beaucoup de motards, par exemple, ignorent les feux sémaphoriques pensant qu’ils ne les concernent pas. Pourtant, chaque usager a son temps de passage. Si chacun respecte son tour, il n’y aura pas d’accident. Il faut aussi que les passagers et les piétons ne soient pas complices du mauvais comportement des conducteurs : qu’ils les dénoncent et alertent les autorités. Ce n’est pas de la lâcheté, mais une manière de contribuer au respect des lois de la République.
Mosaiqueguinee.com : Merci beaucoup pour votre disponibilité.
Yéké Bérété : Je vous en prie !
Entretien réalisé par Hadja Kadé BARRY