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Monsieur le Président de la Transition,
N’acceptez jamais de trahir et de renier le précieux pacte moral que vous avez scellé avec le peuple de Guinée au lendemain du 5 Septembre 2021.
S’il y a un engagement de votre part et de mon point de vue qui m’avait semblé annoncer une promesse de rupture, c’était votre volonté résolue, on le voyait dans vos yeux, d’impulser de nouvelles pratiques de gouvernance aux antipodes de celles fossilisées depuis plusieurs décennies.
Des pratiques politiques et de gouvernance, tout le monde le sait, qui ont fait le lit d’un état failli et contribué à sa déchéance en fragilisant ses fondements.
Quand je vous adressais une note en octobre 2021, je me réjouissais justement que le pays soit enfin sous le leadership et la direction d’un homme qui dégageait une posture impartiale avec un regard neutre, et qui donnerait à notre pays une direction éthique et morale inédite, claire et précise.
Un soldat qui n’agirait ni sous l’influence de pesanteurs ethnicistes et démagogiques, ni sous celles de réseaux clientélistes et népotistes.
Un soldat qui n’agirait pas et ne laisserait pas agir pour détourner l’appareil de l’Etat pour servir des intérêts personnels et familiaux.
Un officier qui ne criminaliserait pas les contradictions et les divergences, mais qui les prendraient comme un enrichissement plutôt qu’une menace.
Vous avez promis et nous l’avons entendu que la justice sera la boussole qui orientera toutes vos actions
Vous avez promis et nous l’avons entendu de ne pas exercer un pouvoir trop personnel, excessif et de terreur.
Parce que l’histoire a montré que chaque fois qu’un dirigeant fait le choix de gouverner par la peur, il devient Vulnérable parce qu’entouré de personnes peu ou pas honnêtes. Il finit par être mal informé, manipulé et coupé de la réalité.
C’est pourquoi, vous devez vous méfier des démagogues et opportunistes rapaces qui rivalisent de flagornerie à votre égard.
Ils ne vous aiment pas, pas plus que la Guinée d’ailleurs, ils courent derrière leurs intérêts égoïstes et leurs appétits cupides qui sont insatiables.
Ils sont inconfortables dans un écosystème exigeant fondé sur le culte des valeurs et la discipline.
Vous avez promis et nous l’avons entendu de ne pas faire la promotion du culte de la personnalité.
Notre avenir ne se trouve pas dans le culte d’une personne.
Notre avenir se trouve dans le culte des valeurs durables d’intégrité, d’équité, de transparence, d’éthique et de redevabilité.
Une Guinée forte qui doit rayonner dans ce monde de compétition a besoin non pas d’une administration publique politisée et au service d’un homme, mais d’une administration publique neutre et impartiale tournée vers l’excellence, le travail acharné et au service de l’intérêt général.
Aujourd’hui, force est de constater que plusieurs actions posées sur le terrain sont très malheureusement en décalage profond avec votre discours initial de prise de pouvoir.
Monsieur le Président,
Je n’ai personnellement rien contre votre candidature.
Je crois d’ailleurs que ce débat a été très malheureusement vicié par le spectre d’un passé corrompu.
En tant que Guinéen, vous avez raison d’avoir des ambitions pour notre pays, vous avez raison d’avoir un rêve d’une société meilleure au profit de nos populations.
Mais vous n’êtes pas seul à rêver faire de la Guinée une terre d’espérance.
Comme vous, plusieurs Guinéens caressent le même rêve, et ont des projets similaires.
Alors le vrai débat, celui qui aurait mérité de drainer toutes nos énergies et nos enthousiasmes, c’est celui qui consiste à œuvrer pour que tous ceux qui, y compris ma modeste personne, pensent avoir des projets d’avenir pour notre pays, aient la possibilité d’exposer leurs contours au peuple de Guinée, seul à même de leur conférer une onction populaire.
Comme pour reprendre l’expression de Claude Lefort :
<< Contrairement aux systèmes politiques où le lieu du pouvoir trouve sa légitimité dans la force ou le sang, le lieu du pouvoir en démocratie est un lieu vide, anonyme et libre, susceptible d’être occupé par n’importe qui bénéficiant de la confiance du peuple >>
Le vrai débat donc ,et vous devez l’entendre, est comment construire dans le cadre d’une démarche hautement inclusive, un processus électoral libre , honnête et transparent susceptible de garantir l’intégrité du choix souverain du peuple de Guinée.
Un processus électoral qui allie un cadre légal et réglementaire robuste et des institutions indépendantes.
Un processus électoral qui protège les droits des électeurs et fixe des sanctions contre la délinquance électorale, afin que leur choix souverain qui est sacré reflète véritablement leur volonté.
Un processus électorale qui garantit la mise en place d’un organe de gestion indépendant, doté d’une autonomie financière, administrative et opérationnelle, afin d’être en capacité:
1-D’organiser
2-De Superviser
3- De contrôler l’ensemble du processus sans aucune ingérence politique.
Enfin, il faut un système de gestion des Opérations de vote fiable et vérifiable, qui permet un audit public des résultats sortis des urnes, leur accessibilité et leur diffusion en temps réel .
Il faut pour cela, l’ouverture d’une concertation nationale large et sérieuse afin que l’ensemble des questions évoquées plus haut puissent faire l’objet de discussions sans tabou et que, comme vous l’avez déploré dans vos toutes premières déclarations de prise de pouvoir, je vous cite: <<aucun Guinéen ne meurt pour rien>>.
Pour moi, c’est ce genre de défis sur lequel toutes les composantes de la vie nationale doivent pouvoir s’acharner, pour qu’il soit encré profondément et durablement comme valeur à célébrer.
Le jours où nous parviendrons à stabiliser un tel mécanisme, comme nos voisins sénégalais ont su le faire, la question des candidatures individuelles sera un débat de seconde zone.
Mais attention, et je voulais finir par là, parce que c’est extrêmement important. La crise que connaissent nos modèles de démocratie trouve sa justification en partie dans le fait qu’on a trop longtemps considéré l’élection comme une variable motrice.
Il suffit de faire des élections pour que la prospérité suive et que le pays se développe.
Non, bien qu’étant un outil démocratique fondamental, l’élection n’est qu’un premier pas, un premier jalon dans un processus plus vaste de mise en œuvre de politiques publiques.
C’est un indicateur de légitimité, elle ne résoudra pas à elle seule tous les problèmes de notre pays.
La démocratie repose aussi et surtout sur la transparence, sur l’éthique, la redevabilité, le dialogue et surtout sur des « citoyens exigeants » qui veillent sur notre « socle commun » de manière continue et assidue.
Étienne Soropogui
Président de Nos Valeurs Communes